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L’architecture des Arabes

l'histoire



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DOCUMENTE SIMILARE

L’architecture des Arabes

1. – État actuel de nos connaissances
relatives à l’architecture des Arabes



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L'archéologie moderne s'est peu occupée des monuments laissés par les Arabes. Ils sont souvent situés bien loin, et leur étude n'est pas toujours facile. En dehors de trois ou quatre monographies importantes consacrées presque exclusivement à l'Alhambra et aux mosquées du Caire et de Jérusalem, les livres sont à peu près muets sur eux. Batissier, auteur de l'une des meilleures histoires de l'architecture que nous possédions, écrit, dans la dernière édition de son Histoire de l'art monumental portant la date de 1880, « que l'histoire de l'architecture musulmane, est en grande partie à faire, » et il regrette d'avoir eu à traiter ce sujet d'une façon si incomplète. Ce savant auteur commet en effet plusieurs erreurs. On ne voit figurer, du reste, parmi les nombreuses gravures de son important travail, aucun monument musulman de la Syrie, de la Perse ou de l'Inde, et la mosquée d'Égypte qu'il donne comme type représente certainement, avec sa porte et ses fenêtres rectangulaires, et sa coupole bulbeuse, le plus mauvais spécimen que l'on pouvait choisir de l'architecture arabe de l'Égypte.

Sédillot, qui a publié la deuxième édition de son Histoire des Arabes en 1877, s'exprime de façon analogue. « On doit regretter, dit-il, que l'on n'ait pas encore étudié d'une manière générale les édifices que les Arabes ont élevés en Syrie, en Mésopo­tamie, en Perse, et même dans l'Inde, aux différentes époques de leur domination. Ils doivent offrir des caractères particuliers qu'il serait utile de déterminer exactement. »

Le même souhait était formulé depuis déjà bien longtemps. Nous le trouvons notamment dans le bel ouvrage de G. de Prangey sur l'architecture des Arabes en Espagne. « Il serait curieux de pouvoir examiner, dit-il, les principaux édifices élevés par les Arabes en Syrie, en Perse, en Égypte et en Afrique (l'auteur oublie l'Inde). Quels sont les plans généraux, les dispositions particulières, les détails de construc­tion et d'ornementation, le caractère enfin de la célèbre mosquée el Acza, élevée par Omar à Jérusalem ? de celles de Damas, de celle d'Amrou et de Touloun, au Caire, de la mosquée de Kairouan ? »

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 414

la figure # 302

Arcades de la mosquée de Cordoue.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Une étude comparée des monuments laissés par les Arabes dans les divers pays sur lesquels s'est étendue leur domination était évidemment indispensable pour arriver à l'intelligence de leur architecture. Elle seule pouvait mettre en évidence la parenté engendrée par la communauté des institutions et des croyances, et les différences imprimées par les milieux et par les races diverses où ces croyances et ces institutions se sont manifestées. Les rares monographies que nous possédons devaient forcément laisser de côté ces questions fondamentales.

En se bornant à étudier l'architecture arabe d'un seul pays, on s'expose à des erreurs aussi grossières que celles commises par Chateaubriand dans son Itinéraire de Paris à Jérusalem, lorsque parlant des mosquées du Caire, il trouve qu'elles ressem­blent aux anciens monuments égyptiens, avec lesquels personne ne voudrait soutenir aujourd'hui, qu'elles aient le moindre rapport. Si deux architectures sont profondé­ment dissemblables, à tous les points de vue, ce sont assurément celles des Pharaons et des Arabes ; et on ne pourrait citer aucun exemple d'un emprunt quelconque fait par les seconds aux premiers.

On ne saurait songer à tracer dans un court chapitre cette histoire de l'architecture arabe, qui manque dans la science ; il est possible cependant d'en marquer les divi­sions essentielles, et de montrer en quoi diffèrent ou se ressemblent les monuments que l'art arabe a laissés de l'Espagne jusqu'à l'Inde. La tache n'est pas facile ; car nous devons nous engager dans une voie où nous n'avons pas été précédé, et la place restreinte dont nous disposons nous oblige à nous limiter aux considérations les plus importantes.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 415

les figures # 303-307

Tours de diverses églises de Tolède copiées sur d'anciens minarets arabes.

téléchargeables sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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2. - Éléments caractéristiques
de l'architecture des Arabes

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Nous avons déjà indiqué les origines de l'architecture arabe, montré ses emprunts aux Perses et aux Byzantins, et indiqué comme elle se dégagea bientôt de ces origines pour constituer un art d'une originalité féconde.

Avant d'aborder l'étude d'ensemble des monuments laissés par les Arabes dans les divers pays, nous allons examiner brièvement les éléments dont se compose leur architecture.

Matériaux de construction. - Les matériaux de construction employés par les Arabes ont varié suivant les pays qu'ils occupaient et le but qu'ils se proposaient. Ils ne firent d'abord usage que de la brique, mais arrivèrent bientôt à employer la pierre dans les monuments importants, tels que les chateaux de la Ziza et de la Cuba, en Sicile, la mosquée d'Hassan, au Caire, etc. Ils firent fréquemment usage, principale­ment en Espagne, d'une sorte de béton formé d'un mélange de chaux, de sable, d'argile et de petites pierres, qui devient bientôt aussi dur que la pierre de taille.

On a reproché aux monuments arabes de manquer de solidité. Exacte pour beaucoup d'entre eux, cette observation ne l'est pas pour tous. Lorsque les Arabes voulaient faire vite, et se contenter de l'apparence, leurs édifices n'étaient guère plus solides que nos maisons actuelles ; mais le seul fait qu'ils ont laissé des édifices, vieux aujourd'hui de plus de mille ans, prouve qu'ils savaient fort bien construire des monuments durables quand la chose leur semblait nécessaire. De simples chateaux, comme ceux de la Sicile, sur lesquels huit siècles ont déjà passé, ont résisté à toutes les intempéries. L'Alhambra, lui-même, malgré sa légèreté apparente résiste encore.

Colonnes et chapitaux. Dans tous les pays où parurent les Arabes, ils trouvèrent un grand nombre de monuments grecs, romains, byzantins en ruines ou abandonnés, dont ils utilisèrent les colonnes et les chapiteaux. C'est pour cette raison que leurs premiers monuments contiennent tant de colonnes d'origine étrangère. Lorsque cette provision fut épuisée, ils durent naturellement se mettre à en construire eux-mêmes. Elles eurent alors ce cachet personnel qu'ils savaient imprimer à toutes leurs oeuvres. Celles qu'on voit à l'Alhambra, dans la cour des Lions, ne dérivent, comme l'a fort bien remarqué M. G. de Prangey, d'aucun style connu, et doivent être considérées comme tout à fait spéciales aux Arabes.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 416

les figures # 308-309

Tours d'églises de Tolède copiées sur d'anciens minarets.

téléchargeables sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Arcades - L'ogive, de même que l'arc outrepassé, forment deux caractéristiques de l'architecture arabe, que l'on rencontre dans leurs premiers monuments. J'ai trouvé l'ogive employée concurremment avec le plein cintre dans les plus anciens monu­ments arabes que j'ai eu l'occasion d'étudier en Europe, en Asie et en Afrique. La brisure de l'arc à son sommet, de même que l'étranglement à sa base, qui s'accentue­ront dans les monuments postérieurs, sont d'abord très faibles, et il faut quelque attention pour les reconnaitre. Ils existent cependant, et suffisent à donner à la courbe une forme très gracieuse.

L'ogive s'accentua de plus en plus en Égypte, mais le retour de l'arc à sa base ne fut jamais très prononcé. En Espagne et en Afrique, il s'exagéra au contraire au point de donner à l'ouverture cette forme particulière que l'on a désignée sous le nom de fer à cheval, ou arc outrepassé, et qui fut caractéristique de l'art arabe dans ces deux contrées à une certaine époque.

On assure que l'arc outrepassé fut connu des Byzantins ; mais on n'en fournit guère de preuves, car cette forme ne s'observe pas dans la plupart des monuments de cette époque. Je crois néanmoins que, bien que très peu employé, il fut connu. J'ai trouvé, en effet, à Athènes, sur l'église Kapnikaréa, édifiée en 418 par l'impératrice Eudoxie, d'après une inscription que j'ai relevée sur une colonne, des arcades dont l'arc est très légèrement outrepassé. Le retour à la base de l'archivolte est d'ailleurs si faible, qu'il faut quelque attention pour le reconnaitre.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 417

la figure # 310

Tour arabe de l'église Santiago, à Tolède, d'après une photographie.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Minarets - Les minarets qui surmontent toutes les mosquées dérivent, comme on le sait, de la nécessité d'appeler les fidèles à la prière, conformément aux prescriptions religieuses. Leurs formes varient suivant les pays et sont même, à ce point de vue, très caractéristiques. Ils sont coniques en Perse, carrés en Espagne et en Afrique, cylindri­ques et terminés en éteignoirs en Turquie, de formes variées à chaque étage en Égypte. Plusieurs des minarets d'Égypte, et principalement celui de Kaït bey, au Caire, sont de véritables merveilles et rien ne révèle mieux l'ingéniosité et le sens artistique des Arabes que les parti qu'ils ont su tirer d'une simple tour. C'est surtout en comparant leurs minarets avec ceux des Turcs qu'on peut se rendre compte de la distance immense qui sépare le sens artistique des deux peuples.

Comme la plupart des édifices arabes, les minarets sont généralement couronnés par des sortes de créneaux de formes variées (trèfles, fers de lances, fers de hallebar­des, dents de scie, etc.), nommés merlons. Ils étaient connus en Perse au temps des Sassanides ; mais leurs formes étaient beaucoup moins variées.

Coupoles - Bien que le mot coupole dérive directement de l'arabe, on ne peut nullement attribuer cette invention aux musulmans. Les coupoles furent employées bien avant eux dans les palais des rois Sassanides et par les Byzantins. Mais ce qui est spécial aux Arabes, c'est la forme élancée du sommet et rétrécie à la base qu'ils leur donnèrent. Une section verticale de la coupole passant par son centre donnerait une courbe rappelant précisément la forme de leurs arcades. En exagérant cette courbe, les Persans arrivèrent plus tard à ces coupoles bulbeuses dont nous aurons à parler bientôt.

La forme des coupoles arabes varie suivant les pays. En Afrique, et notamment à Kairouan, elles sont surbaissées comme celles des Byzantins, et on en voit plusieurs sur chaque mosquée. En Égypte, elles ont généralement la forme décrite plus haut, et ne figurent jamais sur les mosquées, mais seulement sur les tombeaux ou sur les salles attenantes aux mosquées contenant un tombeau. Toutes les fois qu'on voit en Égypte une coupole sur une mosquée, on peut affirmer qu'elle renferme un tombeau.

Les coupoles de Syrie rappellent un peu par leurs formes - au moins celle de la mosquée d'Omar très légèrement rétrécie à sa base - les coupoles d'Égypte. Elles sont cependant moins élancées, plus lourdes et ne sont pas revêtues d'ornements.

On trouve en Égypte, et particulièrement dans le cimetière qui est au pied de la citadelle du Caire, baptisé sur notre gravure du nom de plaine des tombeaux des khalifes, toutes les variétés possibles de coupoles : hémisphériques, elliptiques, cylin­driques, coniques, ogivales, à nervures, etc.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 419

la figure # 311

Porte de Bisagra, à Tolède.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Pendentifs - Les architectes arabes semblent avoir eu une antipathie profonde pour les surfaces unies, les angles et les formes rectangulaires, chers, au contraire, aux anciens Grecs. Afin de combler les coins des murs se coupant à angles droits, et pour relier par des transitions insensibles les voûtes circulaires aux salles carrées qui les supportent, ils ont fait usage de petites niches en encorbellement ayant la forme d'un triangle sphérique. On les a nommées pendentifs, parce qu'elles pendent sur le vide. Ces petites voûtes leur paraissant trop géométriques, ils les ont superposées par séries graduelles, et sont arrivés à former un ensemble qu'on a nommé stalactites et dont l'aspect rappelle celui d'une ruche d'abeilles. On retrouve leur emploi dès les dixième et onzième siècle en Sicile. Les Arabes d'Espagne les modifièrent en donnant aux concavités sphériques la forme de prismes verticaux à facettes concaves.

L'usage des stalactites en pendentifs est spécial aux Arabes, et n'a été retrouvé jusqu'à présent chez aucun autre peuple. À partir du douzième siècle ce genre d'orne­mentation fut adopté dans tous les pays musulmans. On en fit des applications journalières pour relier les saillies extérieures aux galeries des minarets avec les surfaces verticales, pour remplir les voûtes des mosquées, pour rattacher celles-ci aux murs leur servant de supports, pour relier les voûtes sphériques à des surfaces carrées, etc.

La fréquence de l'encorbellement est une caractéristique de l'art arabe. Je ne saurais admettre cependant avec M. Ch. Blanc qu'elle résulte « de la nécessité de se créer des ombres au moyen de fortes saillies. » Les encorbellements, en effet, n'en donnent guère, et ils sont aussi fréquents dans l'intérieur des édifices, où il est inutile de créer de l'ombre, qu'à leur extérieur. Les encorbellements des minarets ne résultent pas davantage « de la nécessité d'avoir de hautes galeries, d'où le muezzin pût crier l'appel à la prière. » Les minarets de Constantinople, et ceux de la Perse, ont galerie, mais toutes ces variétés de sculptures qui se détachent en saillie sur les minarets du Caire, n'y figurent guère. Je ne puis voir dans ce mode d'ornementation que l'antipa­thie des Arabes pour les angles et les surfaces unies dont je parlais plus haut. Elle se trahit dans l'exécution de toutes leurs oeuvres d'art, qu'il s'agisse d'un encrier, de la reliure d'un coran ou d'un minaret.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 420

la figure # 312

Vue prise dans l'Alhambra ; d'après une ancienne gravure.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Arabesques et détails d'ornementation. - L'ornementation des monuments arabes est tellement caractéristique qu'elle suffit à révéler immédiatement leur origine à l'individu le plus ignorant en architecture.

Ces ornements, formés de dessins géométriques mélangés d'inscriptions, consti­tuent un ensemble plus facile à figurer qu'à décrire. Leur exécution est soumise d'ailleurs, Malgré leurs capricieuses apparences, à des règles fort simples, très bien mises en évidence par M. Bourgoin.

Les arabesques étaient sculptées sur pierre, comme dans beaucoup de mosquées du Caire, ou simplement moulées, comme à l'Alhambra.

L'écriture arabe joue un grand rôle dans l'ornementation et s'harmonise merveil­leusement avec les arabesques. jusqu'au neuvième siècle on ne fit usage que de caractères koufiques, ou de leurs dérivés, tels que le karmatique et le koufique rectangulaire.

Ces inscriptions sont généralement tirées du Coran ; les plus employées sont les premières lignes de ce livre : Bis m'Illah-el-rahman el-rahim (au nom de Dieu clé­ment et miséricordieux) ou la sentence qui résume l'islamisme : La Illah el Allah Mohammed rasoul Allah (Il n'y a d'autre Dieu qu'AlIah, Mahomet est son prophète).

L'écriture arabe est tellement ornementale, que les architectes chrétiens du moyen age et de la renaissance ont souvent reproduit sur leurs monuments des fragments d'inscriptions arabes tombés par hasard entre leurs mains, et qu'ils prenaient pour de simples caprices de dessinateurs. MM. de Longpérier, Lavoix, etc., en ont fréquem­ment trouvé en Italie. Ce dernier a vu dans la sacristie de la cathédrale de Milan « une porte ogivale formée par un mot arabe plusieurs fois reproduit. Sur les portes de Saint-Pierre, commandées par le pape Eugène IV, une légende arabe forme auréole autour de la tête du Christ, et une longue bande de lettres coufiques se développe sur les deux tuniques de saint Pierre et de saint Paul. » Je regrette que l'auteur ne nous ait pas traduit ces inscriptions : il serait curieux de savoir si celle qui se trouve autour de la tête du Christ signifie qu'il n'y a d'autre Dieu qu'Allah et que Mahomet est son prophète.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 422

la figure # 313

Détail d'ornementation d'un chapiteau et d'une colonne de l'Alhambra.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Décoration polychrome. On a considéré longtemps comme un article de foi que les Grecs ne coloriaient pas leurs monuments et leurs statues. Les règles adoptées par eux faisant loi chez les peuples latins, il s'est ainsi formé un goût artificiel qui nous fait considérer un monument blanc comme une chose fort belle. Le soleil le rend aveuglant et noie tous ses détails ; mais la tradition oblige de l'admirer. Les recher­ches modernes ont heureusement prouvé que les Grecs avaient des goûts fort diffé­rents de ceux qu'on leur attribuait, et que la plupart de leurs monuments étaient couverts de couleurs. Le bleu, le jaune et le rouge étaient les tons les plus employés. Au temple d'Egine, l'architrave était peinte en rouge, et sur ce fond rouge se déta­chaient des boucliers dorés. Le tympan avait un fond bleu avec des moulures d'encadrement rouges et vertes.

Les goûts artistiques des Arabes leur ont fait préférer instinctivement les monu­ments polychromes aux monuments blancs. Leurs arabesques sont généralement revêtues de couleurs disposées avec beaucoup de science et de goût. La surface de tous les murs de l'Alhambra était autrefois recouverte de couleurs éclatantes. Les murs extérieurs des mosquées l'étaient fréquemment.

En Égypte, les couleurs employées par les Arabes étaient le rouge, le bleu, le jaune, le vert et l'or. L'auteur qui a le mieux étudié l'Alhambra, et qui a dirigé la restauration de la cour des Lions, au Palais de Cristal à Londres, Owen Jones, a clairement prouvé qu'à l'exception des faïences émaillées du bas des murs, les Arabes n'ont fait usage à l'Alhambra que de trois couleurs, le bleu, le rouge et l'or, c'est-à-dire le jaune. Elles sont disposées suivant des principes très rationnels. La couleur la plus intense, le rouge, était placée dans le fond des moulures ; le bleu sur les parois latérales et toujours de façon à occuper la plus large surface pour compenser l'effet du rouge et de l'or. Les tons étaient séparés par des bandes blanches ou par l'ombre produite par le relief de l'ornement. Les colonnes étaient probablement dorées, car des colonnes blanches n'eussent pas été en harmonie avec l'ornement polychrome qu'elles supportaient.

Quant aux couleurs verte, brune, pourpre, etc., dont on retrouve des traces à l'Alhambra, le même auteur a prouvé qu'elles étaient le résidu des mauvaises restaura­tions espagnoles tentées à diverses époques. Ce sont probablement ces barbouillages qui ont induit en erreur les restaurateurs actuels de ce palais. Les parties qu'ils ont refaites, et surtout les réductions qu'ils vendent au public, ne sont nullement en rapport avec les principes que je viens d'exposer, et que j'ai tache de suivre, autant que les nécessités de la chromolithographie le permettaient, dans la reconstruction d'un pavillon de l'Alhambra qui figure parmi les planches coloriées de cet ouvrage.

3. - Étude comparée des divers monuments
d'architecture arabe

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Monuments de la Syrie. - Parmi les monuments de la Syrie, nous n'avons men­tionné jusqu'ici que ceux postérieurs à Mahomet. Bien avant lui cependant des tribus arabes vivaient dans cette contrée et y avaient fondé de puissants royaumes. Les quelques ruines, fort peu étudiées encore, découvertes à Bosra prouvent que l'archi­tecture était très avancée déjà, et il est probable que quand les musulmans arrivèrent en Syrie, ils utilisèrent les connaissances de leurs compatriotes, mais, faute de documents, nous n'avons pu parler de cette époque oubliée et n'avons mentionné que les monuments batis depuis Mahomet, notamment les mosquées d'Omar, d'el Acza et de Damas, édifices fort anciens remontant, au moins dans leurs parties fondamentales, au premier siècle de l'hégire, et de styles assez différents.

Ces trois monuments sont empreints de ces influences byzantines et persanes dont l'art arabe ne s'est jamais débarrassé entièrement en Syrie. Il est à remarquer qu'ils présentent, même dans les parties anciennes, le commencement de l'ogive et du fer à cheval, c'est-à-dire l'arc très faiblement brisé à son sommet et légèrement rétréci à sa base. On retrouve ces formes caractéristiques à Damas, dans les arcades de la cour, et à l'el Acza, dans presque toutes les parties du monument. Je les ai retrouvées égale­ment à la mosquée d'Omar dans les arcades de la première rangée intérieure de colonnes.

Dans tous ces monuments primitifs, les chapiteaux sont toujours reliés d'une colonne à l'autre par de grandes poutres de jonction, système spécial aux architectes arabes.

En Syrie, les premiers minarets, à en juger par le plus ancien de la mosquée de Damas, paraissent avoir été de forme carrée.

Les dômes furent employés en Syrie, mais ils étaient généralement surbaissés comme ceux des Byzantins; celui de la mosquée d'Omar fait exception, mais il a été reconstruit à une époque postérieure à l'édification du monument.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 424

la figure # 314

Détails de l'étage supérieur de la Salle des deux sœurs, à l'Alhambra ;
d'après un dessin de O. Jones.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Monuments de l'Égypte. - Nous avons montré dans notre chapitre consacré à l'histoire des Arabes en Égypte la série des transformations profondes subies par leur architecture pendant huit cents ans, depuis la mosquée d'Amrou, construite en 742, jusqu'à celle de Kaït bey, édifiée en 1468. D'abord byzantin, l'art se dégagea bientôt de toute influence étrangère et arriva à des formes entièrement originales.

Bien que la mosquée d'Amrou ait été restaurée plusieurs fois, une partie de son ornementation primitive semble avoir été respectée. On y voit déjà en germe la future ogive et le rétrécissement inférieur de l'arcade. Les minarets, très simples, n'ont qu'une galerie et se terminent en pointe.

La mosquée de Touloun, construite en 876, commence à se dégager visiblement des influences byzantines. Les arcades, nettement ogivales, sont supportées par des piliers présentant des colonnes incrustées dans les angles. Les fleurs et les feuillages servant d'ornements sont d'un style nouveau déjà voisin des arabesques. Les stalac­tites ne se montrent pas encore.

La mosquée de Touloun est construite en briques. Son minaret a trois étages et ne présente aucun ornement extérieur, mais il affecte une forme différente à chaque étage. Carré à la base, il est ensuite cylindrique, puis octogonal.

Dans la mosquée el Azhar, commencée à la fin du dixième siècle, mais complétée à des époques postérieures, l'ornementation est beaucoup plus riche et plus variée. L'arc des arcades est devenu beaucoup plus aigu que dans les précédentes mosquées. Les stalactites se montrent partout. Les minarets sont à plusieurs galeries et richement ornés.

La mosquée de Kalaoun (1283) nous a donné un véritable type de l'art ogival arabe à sa période culminante. Nous avons vu qu'elle présentait beaucoup d'analogie avec les premiers monuments gothiques du moyen age.

La mosquée d'Hassan (1356) nous a fourni un type de l'art arabe arrivé à peu près à son plus haut degré de splendeur. Ce monument gigantesque, avec ses murailles de 8 mètres d'épaisseur, son grand portail de 20 mètres de hauteur, sa coupole de 56 mètres et ses minarets de 86 mètres est bien plus parent de nos grandes cathédrales que des primitives mosquées. Il prouve que les Arabes savaient très bien construire au besoin des édifices vastes et solides.

Les mosquées de Barkouk (1384), et Mouaiad (1415), et surtout celle de Kaït bey (1468), nous ont montré les nouveaux progrès réalisés par les Arabes. Ce dernier édifice, avec son admirable coupole, son superbe minaret, si riche en consoles, corni­ches, galeries et ses splendides sculptures, est un monument absolument original. S'il constituait la seule oeuvre laissée par les Arabes, il serait certainement considéré comme le représentant d'un art n'ayant de parenté rapprochée ou lointaine avec aucun autre.

La mosquée de Kaït bey et les mosquées de son époque, telles que celle de Kagh bey (1502), sont les dernières productions remarquables de l'architecture en Égypte. À partir du seizième siècle, c'est-à-dire à dater de la conquête turque de Selim, il n'y a plus d'art arabe dans cette contrée. Il est écrasé rapidement par les vainqueurs, et s'éteint graduellement. L'art n'existe qu'à la condition de pouvoir être apprécié, et par suite encouragé. Or une conception artistique élevée ne saurait être appréciée par le cerveau d'un Turc. Les monuments construits pendant la période turque sont lourds de forme, surchargés d'ornements, et revêtus de couleurs criardes. « Par bonheur, dit justement Ebers, ils n'ont que peu de temps à blesser l'œil de l'artiste ; ils n'ont pas été élevés pour durer, mais pour servir l'espace du moment qui les use. La postérité, à laquelle ne songeaient pas ceux qui les ont faits, se vengera d'eux en les oubliant. »

Monuments de l'Afrique septentrionale. Il n'y a qu'une parenté très faible entre les monuments arabes de l'Afrique septentrionale ou de la Sicile avec ceux de l'Égypte, mais leur parenté avec les primitives constructions de l'Espagne est au contraire assez grande. Nous ne pouvons parler des palais de l'Afrique, car il n'en reste plus aujourd'hui ; mais Marmol, qui visita ceux de Maroc et de Fez un siècle après la chute de Grenade, dit, dans sa description de l'Afrique, « qu'ils étaient, pres­que en tout, semblables à l'Alhambra. »

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 426

la figure # 315

Galerie supérieure de l'une des cours de l'alcazar de Séville ;

d'après une photographie de Laurent.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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La parenté qui existait probablement entre les anciens palais arabes de l'Afrique et de l'Espagne existe sûrement entre leurs monuments religieux. Ceux qui sont parvenus jusqu'à nous en fournissent la preuve irrécusable. Cette parenté se manifeste surtout dans les minarets. Ils sont généralement carrés et sans galeries ni saillies extérieures. Quelques-uns présentent deux ou trois étages en retrait. Par leur ensemble et leurs détails, ces monuments diffèrent entièrement des constructions analogues de l'Égypte. Tous les minarets africains, depuis Kairouan jusqu'à Fez, en y comprenant ceux de construction relativement moderne, mais copiés sur d'anciens modèles, d'Alger et de Tanger, appartiennent à la même famille. Nous retrouvons des représen­tants de cette famille à Séville dans la Giralda et surtout à Tolède dans de nombreuses tours d'église d'origine visiblement arabe.

En dehors de leurs minarets si caractéristiques, les anciennes mosquées de l'Afri­que, telles que celles de Kairouan, présentent encore comme élément spécial l'emploi de dômes byzantins surbaissés, fort différents de ceux de l'Égypte et de la Perse. La grande mosquée de Kairouan, reproduite pour la première fois dans cet ouvrage, a quatre coupoles surbaissées.

Autant que nous pouvons en juger par les monuments existant encore aujourd'hui, l'art arabe a toujours subi l'influence byzantine dans l'Afrique septentrionale, le Maroc excepté, et n'a jamais su s'y soustraire comme en Égypte et en Espagne.

Monuments de la Sicile. - Les principaux monuments arabes de la Sicile sont les deux chateaux de la Ziza et de la Cuba, près de Palerme, élevés au milieu du dixième siècle. Il n'existe nulle part de chateau arabe d'une époque aussi ancienne. Leur étude présente par conséquent un intérêt très grand. La fréquence des relations des Arabes de la Sicile avec ceux de l'Afrique doit faire supposer que ces constructions devaient être fort analogues à celles de l'Afrique et nous pouvons ainsi nous faire une idée de ces dernières.

Les chateaux de la Ziza et de la Cuba servaient à la fois de forteresse et de palais. Construits en pierres de taille solidement appareillées, ils ont pu traverser impuné­ment les siècles.

La Ziza, près de Palerme, a la forme d'un vaste cube de maçonnerie. Ses murs offrent à l’œil une combinaison sévère de longs arceaux de forme légèrement ogivale encadrant des fenêtres géminées jadis ornées de colonnettes. La frise, servant de couronnement et de parapet, était autrefois revêtue d'une inscription en caractères karmatiques dont il reste quelques traces. J'ai donné dans un autre chapitre, d'après Girault de Prangey, la reproduction de l'intérieur d'une salle de ce chateau telle qu'elle était il y a quarante ans. L'ornementation en est simple et élégante. On y remarque des pendentifs en stalactites, comme en Espagne, mais il est difficile de savoir si les restaurations effectuées sous les rois normands par des ouvriers arabes n'en ont pas modifié le style primitif.

À peu de distance du chateau de la Ziza se trouve celui de la Cuba.

L'aspect extérieur de la Ziza et de la Cuba, leurs longues arcades ogivales, l'appareil régulier de la construction les différencient sensiblement des palais arabes d'Égypte. Pour mon compte, j'en vois bien peu et ne trouve guère, en cherchant beau­coup, que certaines parties de la mosquée de Kalaoun qui aient quelque parenté lointaine avec eux.

Monuments arabes de l'Espagne. - L'architecture des Arabes en Espagne a été divisée par l'auteur cité plus haut en trois périodes distinctes : byzantines, de transi­tion et mauresque. Bien que cette classification ait été généralement reproduite, je ne vois aucune raison sérieuse de l'admettre. Le mot mauresque, c'est-à-dire berbère, appliqué à l'architecture, me semble un non-sens, parce que rien n'indique que les Berbères aient jamais introduit un élément nouveau quelconque dans les arts arabes. Des dynasties berbères ont régné sur les Arabes d'Espagne, de même que des dynasties circassiennes ont régné sur les Arabes d'Égypte ; mais les unes comme les autres n'ont rien créé dans les arts, et il n'y eut pas plus d'architecture mauresque dans la première de ces contrées qu'il n'y eut d'architecture circassienne dans la seconde.

Nous savons, d'ailleurs, par des témoignages positifs du temps, que, sous les dynasties berbères, les architectes furent toujours des Arabes. Voici ce que dit, à ce sujet, un auteur de l'époque :

« C'est des provinces d'Andalousie réunies à leur empire du Maghreb, écrit Ibhn Saïd, que les émirs Almohades Joussouf et Yacoub el-Mansour firent venir des architectes pour toutes les constructions qu'ils élevèrent à Maroc, à Rabat, à Fez, à Mansouriah D'autre part il est également notoire qu'aujourd'hui (1237) cette pros­périté, cette splendeur de Maroc semble s'être transmise à Tunis dont le sultan actuel construit des monuments, batit des palais, plante des jardins et des vignobles à la manière des Andalous. Tous ses architectes sont natifs de ce pays, de même que les maçons, les charpentiers, les briquetiers, les peintres et les jardiniers. Les plans des édifices sont inventés par des Andalous ou copiés sur les monuments mêmes de leur pays. »

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 428

la figure # 316

Une des portes de la cour des Demoiselles à l'alcazar de Séville ;

d'après une photographie de Laurent.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Le plus ancien monument arabe de l'Espagne est la mosquée de Cordoue. Il appartient à une période que j'appellerai byzantine-arabe et non pas byzantine, car aucun monument byzantin ne ressemble à cette mosquée. Les emprunts faits aux Byzantins (chapiteaux à feuillages, rinceaux, palmettes, entrelacs, mosaïques et orne­ments sur fond d'or, etc.) sont évidents, mais l'emploi de caractères koufiques comme moyens d'ornementation, les arcades à fer à cheval à plusieurs lobes et superposés, et divers motifs d'ornementation, donnent à ce monument un cachet d'originalité telle­ment marqué, qu'on le distingue immédiatement d'un édifice byzantin quelconque. Une circonstance particulière, la nécessité de superposer les colonnes dont on dispo­sait pour attribuer à la construction une hauteur en rapport avec sa largeur, a donné aux nefs de la mosquée un aspect qui ne se retrouve dans aucun autre édifice anté­rieur. Le sens artistique des Arabes se montre dans les combinaisons d'arcades qu'ils employèrent pour masquer cette superposition. Pour soutenir qu'une idée aussi ingénieuse est due à des Byzantins, il faudrait montrer d'autres monuments où elle ait été employée par eux.

Les Arabes d'Espagne s'affranchirent aussi rapidement des influences byzantines que ceux d'Égypte. Les arabesques et les stalactites remplacèrent bientôt les orne­ments byzantins sur fond or, l'arc devint ogival et se festonna délicatement.

Les plus anciens monuments arabes de l'Espagne, après ceux de Cordoue, sont ceux de Tolède. Cette dernière ville en possède de fort intéressants, tels que la porte de Bisagra, commencée au neuvième siècle, celle du Soleil, qui date du onzième, etc. On peut y suivre facilement quelques-unes des étapes des transformations de l'art arabe.

Les minarets des anciennes mosquées espagnoles ont été détruits, et il ne reste plus guère debout que la Giralda, de Séville, datant du douzième siècle. On peut cependant affirmer qu'ils eurent la forme carrée dont j'ai parlé plus haut à propos de l'Afrique et je base cette affirmation sur les imitations qui en ont été faites dans les anciennes tours des églises de Tolède encore debout. Arabes dans leurs détails les plus essentiels, elles doivent également l'avoir été dans leurs formes. On pourrait même aller plus loin et dire que l'Espagne ne connut pas de minarets analogues à ceux du Caire, car ils eussent sans doute été également imités par les chrétiens.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 429

la figure # 317

Ancienne mosquée d'Hamadan (Perse) ; d'après un dessin de Coste.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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À mesure que le séjour des Arabes en Espagne se prolongea, leur architecture devint de plus en plus riche et ornementée et elle fut bientôt débarrassée entièrement de toute influence étrangère. Les ornements byzantins et notamment les mosaïques sur fond or disparurent complètement pour faire place à une ornementation nouvelle. Deux monuments importants, l'Alcazar de Séville et l'Alhambra de Grenade nous montrent cette architecture à sa plus brillante période.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 430

la figure # 318

Mosquée et tombeau de Shah-Koda, à Sultanieh, Perse, XVIe siècle ;

d'après un dessin de Texier.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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L'Alcazar de Séville a été commencé au XIe siècle, mais remanié pendant les douzième et treizième siècles, sans parler des restaurations datant de Charles-Quint, de Philippe II et des temps modernes. La façade est du treizième siècle ; le patio de los munecos, la salle des ambassadeurs et diverses parties sont considérés comme étant fort anciens.

On ne remarque pas sur les parties primitives de l'Alcazar de Séville la profusion d'ornementation de l'Alhambra ni les voûtes en stalactites ; mais le style de ces deux édifices est déjà voisin et ne diffère guère que dans les détails. L'arc fortement outre­passé, à peu près abandonne à l'Alhambra, est au contraire très employé à l'Alcazar. L'arc ogival, également peu usité à l'Alhambra, est fréquemment employé à l'Alcazar. Les plafonds en caissons peints, sculptés et dorés de l'Alcazar présentent beaucoup d'analogie avec ceux des anciens palais du Caire et de Damas.

C'est dans l'Alhambra, monument dont la construction remonte au treizième siècle, que l'art arabe atteint en Espagne la période de sa plus grande richesse. L'orne­mentation y est évidemment exagérée ; mais un goût si fin préside à cette exagération, qu'il est impossible d'appliquer à un édifice semblable le qualificatif d'œuvre de décadence.

Bien que les murs de l'Alhambra, au lieu d'être en pierres de taille, soient formés d'un simple béton composé de chaux, sable, argile et cailloux, et que tous les orne­ments soient simplement en platre moulé, l'édifice présente une grande solidité, puisqu'il a résisté pendant cinq siècles à toutes les intempéries sans avoir jamais eu besoin de subir de restaurations sérieuses.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 431

la figure # 319

Mausolée de Tamerlan, à Samarkand ;

d'après une photographie de l'album du général Kaufman.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Les principaux caractères spéciaux à l'architecture de l'Alhambra et qui me sem­blent la différencier de celle de l'Alcazar de Séville, sont les suivants : revêtement général de toutes les surfaces par des moulures coloriées, emploi de légères colonnes cannelées horizontalement et supportant des chapiteaux couverts d'entrelacs et de feuillages, fenêtres formées d'arcades presque à plein cintre finement festonnées et entourées d'un encadrement rectangulaire, plafonds couverts de pendentifs en stalactites.

Il n'existe plus aujourd'hui en Égypte de palais arabes contemporains de l'Alham­bra, mais si nous jugeons de leur ornementation par celle des mosquées, il semble fort probable qu'il devait exister entre eux des différences importantes. L'art arabe d'Égypte et l'art arabe d'Espagne sont assurément parents, mais ne présentent à toutes les phases de leur existence que des ressemblances assez lointaines.

L'influence de l'architecture des Arabes sur celle des chrétiens qui les rempla­cèrent en Espagne fut considérable. Avant leur expulsion, les musulmans étaient fréquemment employés à la construction ou à la réparation de monuments chrétiens. La combinaison des deux arts engendra, comme nous l'avons vu, un style nouveau dit mujédar. Nous en donnerons plusieurs exemples dans le chapitre consacré à l'influ­ence des Arabes en Europe.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 432

la figure # 320

Élévation restituée de la mosquée des Sunni, à Tabriz (Perse) ;
d'après un dessin de Texier.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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En dehors du style que je viens de mentionner, on rencontre encore en Espagne, dans les anciennes synagogues, un style particulier, très rapproché du reste du style arabe et auquel on peut donner le nom de judéo-arabe. Il ne diffère guère du premier que par l'emploi comme motif de décoration de caractères hébreux et d'ornements divers empruntés au règne végétal, de larges feuillages notamment. Les anciennes synagogues el Transito, et Santa-Maria la Blanca, à Tolède, présentent d'intéressants spécimens de ce style. On y trouve plusieurs réminiscences de l'époque byzantine.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 432

Planche couleurs # 10

ANCIENNES LAMPES ARABES DE MOSQUÉES EN VERRE ÉMAILLÉ

(Musée du Caire). D'après une photographie et une aquarelle du Dr Gustave Le Bon

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Monuments de l'Inde. - L'étude des monuments musulmans de l'Inde fournit un exemple frappant des modifications que l'architecture d'un peuple peut subir sous l'action de races en contact avec lui.

Nous avons vu que lorsque les Arabes arrivèrent dans l'Inde, ils se trouvèrent en présence d'une civilisation ancienne et puissante, et que, s'ils exercèrent par leur religion, leur langue et leurs arts une influence qui persiste encore, leur action politique fut toujours très faible.

Notre description des monuments musulmans de l'Inde nous a fait voir combien l'histoire de l'influence d'un peuple est clairement écrite sur eux. Dans les premiers édifices, tels que la porte d'Aladin, les influences hindoue et arabe sont intimement associées, l'empreinte persane est faible. Plus tard, au contraire, c'est cette dernière, associée en proportions variables à l'influence hindoue, qui domine : l'influence arabe ne se manifeste plus que dans les parties accessoires, telles que l'emploi des inscrip­tions, des stalactites comme motif d'ornementation, et la forme de quelques arcades. Le mausolée d'Akbar, le Tadj Mahal, le palais du grand mogol, etc., sont des exem­ples de combinaisons de toutes ces influences. La superposition de ces styles divers forme, en réalité, un style particulier auquel on peut donner le nom de style mongol de l'Inde ou hindo-persan-arabe. Ses caractères différentiels se montrent sur­tout dans les minarets. Ils sont généralement coniques comme ceux de la Perse, mais non émaillés, sont fréquemment recouverts de cannelures, et présentent plusieurs étages. Leur ornementation extérieure et leur forme générale les distinguent très facilement à première vue des constructions analogues d'Espagne, d'Afrique et du Caire.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 434

la figure # 321

Une mosquée d'Ispahan ; d'après un dessin de Coste.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Monuments de la Perse. - Les monuments persans du temps des Sassanides, c'est-à-dire contemporains de l'invasion arabe, ne sont plus représentés aujourd'hui que par d'informes débris. La plupart de ceux construits par les premiers khalifes ont subi le même sort. Il en résulte que l'histoire de l'architecture persane, et surtout l'histoire de l'influence qu'elle a pu exercer autrefois sur les Arabes, et de celle qu'elle a dû recevoir d'eux plus tard, est fort difficile.

La plupart des édifices importants de la Perse ont été construits sous le règne de Shah Abbas, au seizième siècle ; mais lorsqu'on les compare aux ruines des monu­ments antérieurs, on voit qu'ils sont la reproduction de modèles beaucoup plus anciens. Leur style diffère sensiblement de celui des Arabes ; ils n'ont de commun que certains détails d'ornementation.

Batissier, dans son histoire de l'art monumental, dit, à propos des mosquées de la Perse, « qu'elles ne semblent pas différer de celles de la Syrie ». J'ignore sur quelles bases peut reposer une telle assertion ; je n'ai pu pour mon compte trouver aucune ressemblance entre ces monuments. Les anciennes mosquées arabes de Syrie, c'est-à-dire celles de Damas, de Jérusalem et d'Hébron, ne peuvent être comparées à celles d’Ispahan. L'art persan possède sans doute une parenté évidente avec l'art arabe : après lui avoir communiqué son influence, il en a ensuite reçu la sienne ; mais son originalité ne me semble pas contestable.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 435

la figure # 322

Palais du rajah de Goverdhum (Inde) ; d'après une photographie.

téléchargeable sur le site web : Les Classiques des sciences sociales,
section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Les caractères différentiels des mosquées persanes sont nombreux et faciles à mettre en évidence. Les principaux résident dans la forme des minarets, des arcades, des dômes et dans l'ornementation extérieure.

Les minarets persans, même les plus anciens, rappellent par leur forme les chemi­nées de nos usines. Ils sont tous coniques, peu élevés, à surface émaillée, et n'ont généralement qu'une galerie à leur sommet. Ils diffèrent donc essentiellement des minarets carrés de la Syrie, de l'Afrique et de l'Espagne, et plus encore, s'il est possi­ble, de ceux d'Égypte, constitués par des tours à plusieurs galeries dont la section varie à chaque étage, et qui sont ornées de toutes sortes de sculptures en relief.

Le corps des mosquées persanes n'est pas moins caractéristique. L'entrée du monument est toujours constitué par une sorte de portail gigantesque qu'on rencontre dans les ruines des plus anciennes mosquées, telles que celle d'Hamadan. Il prend toute la hauteur de la façade et se termine à sa partie supérieure par une arcade ogivale renflée latéralement, de forme tout à fait spéciale. Aucune mosquée arabe ne présente de façade analogue.

L'ornementation extérieure des mosquées persanes est également caractéristique. Elles sont revêtues, en effet, de faïences émaillées, couvertes de dessins variés, de fleurs principalement. Ce mode d'ornementation est spécial aux Persans, et quand on le rencontre dans certains monuments arabes, tels que la mosquée d'Omar, on peut affirmer aussitôt qu'il est dû à des ouvriers persans.

Les dômes des mosquées persanes actuelles ont une forme bulbeuse caractéris­tique, mais qui me semble la simple exagération de l'ogive en fer à cheval ou des dômes surélevés rétrécis à leur base des mosquées arabes du Caire. En exagérant le renflement latéral de l'ogive, les Persans sont arrivés à ces dômes qu'on retrouve également dans les mosquées modernes de Bagdad, et que j'ai retrouvés en Russie sur la plupart des églises, celles de Moscou surtout. On considère généralement ces dernières comme étant de style byzantin ; mais la qualification de style byzantin-persan serait, à mon avis, beaucoup plus juste. Les Russes ont toujours été aussi incapables que les Turcs d'avoir un style original ; mais ils ont su parfaitement adapter à leurs besoins, en les mélangeant, des éléments empruntés à l'architecture des peuples avec lesquels ils étaient en relation.

On ne trouve pas de dômes bulbeux dans les ruines des plus anciennes mosquées persanes. Dans la plupart de celles de Samarcande, Meched, Sultanieh, Veramine, Erivan, etc., qui reproduisent sans doute elles-mêmes des monuments antérieurs, les dômes sont tout à fait byzantins, ou à peine rétrécis à leur base.

Les mosquées persanes présentent l'emploi fréquent de pendentifs en stalactites et d'inscriptions en caractères arabes. Ce sont les principaux éléments empruntés aux musulmans.

Le lecteur qui voudra compléter ce qui précède par l'examen des gravures dissé­minées dans cet ouvrage, reconnaitra aisément avec nous que l'architecture arabe a considérablement varié d'un pays à l'autre, et qu'il est aussi impossible de réunir des monuments aussi dissemblables sous une qualification unique, que de confondre sous la dénomination de style français les monuments romans, gothiques et de la Renaissance construits dans notre pays.

Le style byzantin-arabe d'Espagne, représenté par la mosquée de Cordoue, et le style byzantin-arabe de l'Égypte, représenté par les mosquées d'Amrou et de Touloun n'ont que de bien lointaines analogies ; et il en est également de même de l'architec­ture arabe de l'Alhambra et de celle de la mosquée de Kaït bey. Il est donc indispensable d'établir dans le style arabe des divisions fondamentales, et de prendre pour base de la classification, comme nous l'avons fait pour les races, le pays lui-même. Nous pensons que dans l'état actuel de nos connaissances, on peut établir les divisions suivantes :

Style arabe antérieur à Mahomet

Style encore inconnu, et représenté seulement par les ruines à découvrir des an­ciens monuments de l'Yémen et par celles disséminées dans les anciens royaumes arabes de la Syrie, celui des Ghassanides par exemple.

Style byzantin-arabe

Byzantin-arabe de Syrie. - Monuments édifiés ou reconstruits du septième au onzième siècle, tels que les mosquées d'Omar et d'El Acza à Jérusalem et la grande mosquée de Damas.

Byzantin-arabe d'Égypte. - Monuments élevés du septième au dixième siècle, tels que les mosquées d'Amrou et de Touloun.

Byzantin-arabe d'Afrique. - Grande mosquée de Kairouan et diverses mosquées de l'Algérie, construites sur d'anciens types. L'influence byzantine semble encore persister en Afrique, et jusqu'à nos jours les dômes sont généralement restés byzantins.

Byzantin-arabe de Sicile. - Monuments antérieurs à la conquête normande, tels que les chateaux de la Ziza et de la Cuba.

Byzantin-arabe d'Espagne. - Mosquée de Cordoue et monuments arabes de Tolède antérieurs à la fin du dixième siècle.

Style arabe pur

Style arabe d'Égypte. - Ce style se perfectionne constamment du dixième au quinzième siècle. On peut suivre ses transformations dans la série de mosquées que nous avons énumérées et représentées. Il atteint son plus haut degré de perfection dans celle de Kaït bey.

Style arabe d'Espagne. - Le style arabe d'Espagne se transforme également de siècle en siècle ; mais les documents nécessaires pour relier les périodes intermédiaires font défaut. Les seuls monuments bien conservés sont ceux de Séville et Grenade. Ils sont du reste tout à fait typiques.

Style arabe mélangé

Style hispano-arabe. - La combinaison des éléments d'architecture chrétienne et arabe s'observa surtout dans les premiers temps qui suivirent la conquête de l'Espagne par les chrétiens ; mais il s'est continué dans certaines constructions du sud de la Péninsule jusqu'à nos jours. Plusieurs monuments de Tolède, offrent des exemples de ce style mélangé. Nous en avons représenté de nombreux exemples dans cet ouvrage.

Dans l’édition papier de 1980

apparait à la page 437

la figure # 322 bis

Bracelet en or repoussé du XIVe siècle. Style hispano-arabe ;

d'après une photographie. (Musée arch. de Madrid).

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section Auteurs classiques : Gustave Le Bon (1841-1931) :
La civilisation des Arabes (1884).

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Style judéo-arabe. - Représenté par plusieurs monuments anciens de Tolède tels que Santa-Maria la Blanca, El Transito, etc., qui servaient autrefois de synagogues.

Style persan-arabe. - Monuments construits en Perse depuis que ce pays a adopté le Coran, et notamment les mosquées d'Ispahan. Bien qu'ayant subi l'influence arabe, ces édifices ont un cachet d'originalité évident.

Style indo-arabe. Monuments produits par la combinaison d'éléments hindous et arabes, tels que la tour du Koutab, le temple de Benderabund, et surtout la magnifique porte d'Aladin.

Style indo-persan-arabe, ou style mongol de l'Inde. - Monuments construits dans l'Inde sous les Mongols, notamment le Tadj Mahal, le palais du Grand Mogol et beaucoup de mosquées. L'influence arabe qui dominait d'abord, fut bientôt remplacée en grande partie par l'influence persane. Ces monuments constituent un style particulier, mais sans originalité réelle. Les éléments étrangers qui le composent y sont bien plus superposés que combinés.



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